La consigne c'est"in"

Romain Lirot est le coordinateur de la Consigne Bordelaise- photo N. Landré
Romain Lirot est le coordinateur de la Consigne Bordelaise- photo N. Landré

Retour d’une pratique populaire que les moins de cinquante ans ne peuvent pas connaître.

 

Par Nicole Landré

 

Créé en mai 2021, le collectif Reverredire regroupe trois acteurs d’une filière régionale du réemploi du verre en Nouvelle-Aquitaine : La Consigne Bordelaise en Gironde, L’Attache Rapide en Dordogne et Les Retournées dans les Landes et les Pyrénées-Atlantiques. Il est hébergé dans les locaux de l’écosystème Darwin, quai des Queyries à Bordeaux. Romain Lirot en est le cofondateur et le coordinateur de La Consigne Bordelaise. 

Une deuxième vie

Laver les bouteilles plutôt que de les jeter, c’est le credo de Reverredire en matière de traitement du verre. Ce qui va dans le sens de la préservation des ressources de la planète à un moment où les matières premières telles que le sable deviennent rares et chères et où le prix du gaz pâtit du conflit Russie-Ukraine. La consigne ou réemploi est un ensemble d’opérations qui donnent une deuxième vie à un objet tout en gardant son usage initial. Les bouteilles sont collectées et stockées dans de grandes caisses métalliques appelées palox. Elles sont ensuite lavées à 80° et les étiquettes enlevées ; puis elles passent par une insuffleuse où elles sont séchées. La dernière étape consiste à vérifier l’absence de fêlure par le biais de la mireuse. Les bouteilles peuvent alors être conditionnées en palette pour la revente aux producteurs du réseau. Une bouteille ainsi traitée fait économiser 2 kilos de CO2, c’est donc bon pour la planète. Le recyclage du verre tel que nous le nous connaissons est moins vertueux en matière de traitement et plus énergivore. En effet, le verre collecté dans des bennes dédiées est ensuite broyé puis traité dans un four chauffé à 1 500° pendant 24 h pour faire une nouvelle bouteille. 

Orienter le consommateur

L’étape suivante est la commercialisation, Romain précise : « Notre cible première, ce sont les producteurs et les domaines viticoles, les brasseurs de bière, les producteurs de jus de fruits, de lait, de kombucha, de kéfir et de tout ce que l’on peut mettre dans des bouteilles en verre. La grande distribution, les commerces bio de proximité, les épiceries vrac et les cavistes font également partie du dispositif ». Le but est de proposer les articles des producteurs associés, référencés dans un catalogue et d’orienter le consommateur vers des produits consignés. Celui-ci s’engage de façon responsable, il repart avec sa bouteille mais une fois vide, il va la rapporter et peut-être faire un nouvel achat dans le magasin. Le premier avantage de cette démarche est de générer du rachat et de fidéliser le client. Les particuliers ne peuvent rapporter leurs bouteilles vides sauf si elles sont aptes à la consigne et portent un sticker avec le pictogramme « Rapporte moi » et la mention reverredire.fr. Un nouveau service, la livraison gratuite à domicile, est offert depuis peu à Bordeaux via Le Fourgon, déjà présent dans 15 villes en France. Le but est de faciliter les achats de boissons consignées, par exemple du lait français en bouteille de verre. 

Changer d’échelle

Reverredire souhaite évoluer. Au 1er juillet 2023, le collectif va prendre le statut de SCIC (Société coopérative d’intérêt collectif). Ce qui lui permettra de changer d’échelle, d’avoir un capital social avec participations via le sociétariat. Romain Lirot ajoute : « Cette forme de coopérative permettra d’envisager une progression des investissements et du chiffre d’affaires ». Un partenariat est également envisagé avec un prestataire de lavage en Nouvelle-Aquitaine car ce mois-ci, les bouteilles seront encore envoyées dans la Drôme pour le lavage, faute de station dimensionnée dans la région. Toutefois, l’arbitrage économique et écologique de cette opération la rend acceptable. 

Inverser les chiffres

La clientèle des grands châteaux rentre difficilement dans le schéma de la consigne car une partie non négligeable de leur production part à l’export. Aussi, il faut accompagner les producteurs pour augmenter le taux de retour des bouteilles. Il existe donc deux traitements du verre, celui qui peut être consigné et celui qui continue à être recyclé en usage unique. Reverredire assure un complément de service public et veut faire en sorte que l’on puisse inverser les chiffres en faveur de la consigne. Romain conclut en disant : « Faisons fonctionner le bouche à oreille pour faire bouger les mentalités et retenons le précepte : dégustez, rincez, rapportez ». 

Site internet : http://www.reverredire.fr

 

Histoire de la consigne

La consigne est la somme payée par le consommateur lors de l’achat d’un bien distribué dans un emballage réutilisable ou recyclable.

La première entreprise à avoir intégré ce système est A&R Thwaites & Co à Dublin en 1799. Elle s’engageait à payer deux shillings par douzaine de bouteilles d’eau gazeuse rapportées. D’autres entreprises ont suivi et proposé la même démarche.

L’après-guerre et la consommation de masse ainsi que le passage de la bouteille de lait à la brique UHT ont eu raison de la consigne en France. L'heure n’était plus aux économies mais à la facilité avec la bouteille en plastique dont le brevet est déposé en 1963.

 

Activité de Reverredire :

-Des économies réalisées en 2022 : 60 tonnes de CO2 et 16 tonnes de sable préservées sur les plages.

- 40 producteurs et 40 points de vente partenaires.

- 4 départements couverts pour la mise en place de la consigne : Gironde, Dordogne, Landes et Pyrénées Atlantiques.

- En 2021, 7 à 8 000 bouteilles traitées, progression en 2022 avec 30 000 bouteilles sur 300 millions de bouteilles consommées. En France, plus de 45 % des emballages sont en verre et ces contenants peuvent être réutilisés jusqu’à 50 fois.

 

- Sous peu, 0,30 centimes par bouteille inclus dans le prix de vente seront collectés pour la consigne.