Fantasma

Les objets médium peuvent-ils nous permettre d’échanger avec l’au-delà ?

L’exposition Corps subtils du MADD (Musée des arts décoratifs et du design de Bordeaux) est consacrée au jeune designer Felipe Ribon. Il a choisi de faire juxtaposer les objets qu’il a créés avec tous ceux de la collection du musée : ils favorisent le dialogue entre notre conscient et notre inconscient, mais aussi entre nous et le souvenir des personnes qui les ont possédés, utilisés, fabriqués. Lors du vernissage de l’exposition, un professeur de l’Université de Bordeaux est venu expliquer les états de sommeil éveillé.

 

Hypnose

L’hypnose thérapeutique est de plus en plus utilisée dans les hôpitaux. Les anesthésistes, qui pratiquent ce processus, précisent : le patient doit être détendu avant une intervention chirurgicale, alors on lui propose une rencontre quelques jours avant et de penser à des moments agréables. L’hypnose renforce la relation entre patient et thérapeute. Lorsqu’on parcourt des yeux une page d’un livre, sans en retenir le contenu, nous sommes en état d’autohypnose.

Les objets ont été conçus par le designer Felipe Ribon, dans la volonté de mettre l’hypnose à la portée de tous. Il a créé des bols, des tapis ronds aux couleurs douces, un pendule en verre soufflé argenté qui oscille doucement et vous aide à concentrer votre attention. Mais vous ne risquez pas de tomber endormi aussitôt !

 

Objets médium.

Une douce odeur éveille vos sens, un diffuseur en argent libère des molécules odorantes qu’il a choisies pour cette occasion. Vous pénétrez dans le salon, plongé dans la demi-obscurité. Une série de vingt tables aux formes arrondies, en verre expansé, favorisent la réception  vibratoire des ondes. Des visiteurs se souviennent des expériences de spiritisme, si prisées au XIXe siècle : les tables sur lesquelles on posait les mains, agissaient en captant et diffusant les messages de l’au-delà. La tablette alphabétique permettait les questions posées par les participants et l’esprit répondait en faisant glisser le curseur devant lettres ou chiffres.

Tout au long de la visite, vous êtes surpris par des yeux en faïence émaillée, placés sur les murs. Une personne rappelle qu’en Turquie, l’œil est censé protéger du regard assassin ! Dans une vitrine, à côté des reliques de Louis XVI, ou de la Duchesse de Berry, des impressions numériques en 3D représentent peut-être des fantômes. On donne ce nom à toutes les images qui nous font imaginer des êtres corporels qui n’y sont pas ! Des objets électroniques dispersés dans le musée, seraient capables de réagir à la présence de spectres. Ce sont des capteurs de mouvement ou de variations de températures.

 

Fantômes

Dans le cadre de l’exposition Corps subtils, l’auteure franco-japonaise Ryoko Sekiguchi a fait déguster, à quelques curieux, le Dîner Fantasma. On peut manger des nuages, la brume, la transparence. C’est ce qu’elle explique dans son dernier livre Manger fantôme, dans un style à la fois poétique et humoristique. Les fantômes ont le pouvoir de s’infiltrer dans n’importe quelle nourriture ! Ainsi manger des pop-corn au sel parfumé aux truffes permet de penser à celui qui aimait particulièrement ces nourritures. Les fruits et fromages qui étaient très appréciés de Louis XVI, les citrons goûtés par la Duchesse de Berry lorsqu’elle habitait la Sicile ou les gelées transparentes colorées et parfumées à l’absinthe peuvent favoriser les échanges de sensations, de souvenirs…

Le célèbre Thomas Edison rêvait de fournir, aux chercheurs spirites, des appareils très scientifiques, comme le phonographe. Il écrivait : « il parait absurde que les esprits veuillent bien perdre leur temps à faire joujou avec des objets aussi peu scientifiques que des tables, des chaises…Si nous continuons à exister après la mort, alors mon appareil, avec sa sensibilité extraordinaire, nous fournira peut-être un jour la preuve de cette existence. » 

 

Texte et photos de Pierrette Guillot