Des racines et du zèle

Les jardiniers sont par nature partageurs et « échangeurs », c'est pourquoi on voit maintenant fleurir dans le moindre village le troc aux plantes dominical.

 Plaisir de dénicher une variété oubliée ou une plante surprenante !

 

Radieux temps d'automne à Croignon, dimanche matin 12 octobre. De nombreuses voitures sont garées dans un pré et de mystérieuses transactions s'opèrent déjà au cul du camion. Des caisses changent de main, des végétaux passent d'un véhicule à l'autre. Des produits rares sans doute que ne verront pas les stands du troc aux plantes tout proche.

 

Couleurs d'automne

À l'entrée de son parc, Simone Villachoux accueille pour la 11e année les jardiniers amateurs, chargés de caisses, paniers, corbeilles contenant leur précieuse monnaie d'échange. Ancienne présidente de l'UTLC (Université du temps libre de Créon), elle raconte à Mr Grimaud, son successeur, comment ce rendez-vous automnal est devenu incontournable dans les environs. Elle ajoute avec malice qu'elle détient « le secret du soleil » qui garantit le beau temps ce jour-là. Au détour des allées, sous le préau, le long du ruisseau, c'est un chemin de tables couvertes de végétaux sous toutes leurs formes : boutures, éclats, drageons, plants, arbustes, graines et fruits. Tomates et courges variées illuminent de rouge, orange, bleu et noir le vert omniprésent. C'est à la fois animé et calme. Ici, pas de visiteurs, mais des participants qui, en toute convivialité, échangent paroles et plantes.

 

Des passionnés

Derrière son long stand où voisinent vivaces et aromatiques, Jacqueline Luyckx, longtemps organisatrice d'un troc de printemps raconte : « J'ai passé la semaine à inventorier les plantes que je souhaitais échanger, à les conditionner et à les étiqueter. J'ai divisé les vivaces que je collectionne et, en récompense, j'aurai peut-être la chance d'en découvrir de nouvelles aujourd'hui ! » Elle s'interrompt pour renseigner un amateur sur le meilleur endroit pour replanter telle variété d'hellébore ou d'anémone car on partage aussi son savoir-faire. Plus loin, c'est l'étal du Jardin des tomates qui met l'eau à la bouche. Là, il s'agit d'une association dont le but est de partager la biodiversité en entretenant une collection de 1 500 variétés de tomates. Roland Robin, son président, en explique la philosophie : « Semer, planter, partager. Nous ne pratiquons aucune activité commerciale. En échange d'une cotisation de 20 €, chaque adhérent aura droit à 20 plants de tomates de variétés, souvent introuvables ailleurs, que nous cultivons au château de Landiras. » Pas tout à fait du troc, mais bien tentant pour le jardinier gastronome...

 

Dans l'air du temps

Toute la journée, jardiniers débutants, chevronnés amateurs ou collectionneurs vont donner et recevoir. Quoi de plus simple et utile ? Pas d'argent en jeu, un échange équitable, des économies non négligeables, vu le coût des graines et des plantes. Pas de débauche d'emballage, tous les contenants proviennent du recyclage : vieux pots, bouteilles en plastique, boîtes à œufs, barquettes, journaux, cagettes... Pas de gâchis, les plants restants seront partagés entre les participants. Sans oublier la transmission désintéressée de trucs et astuces, en face à face, pas par internet, en toute convivialité. Toute la France s'y est mise, du petit village au jardin botanique urbain. En témoignent les nombreux sites qui recensent tous les événements et apprennent même comment devenir un bon troqueur vert*.

Une jolie folie douce qui concrétise bien les aspirations actuelles de solidarité et d'écologie, à la portée de tous ou presque...

 

Texte et photos de Claudine Bonnetaud

 

 

*Troc-aux-plantes.com

grainesdetroc.fr

graines-et-plantes.com

trocjardin.com

jardins-en-herbes.com