Édito

Après « S’engager », (…) « Danser, chanter », (…) L’Observatoire s’empare une nouvelle fois d’un verbe ; en l’occurrence, « Jouer ». Un mot tout simple, ouvrant bien des portes et qui, sans besoin de consulter le dictionnaire des idées suggérées par les mots, est un des plus inspirants qui soient.

 

Sans doute faut-il voir dans ce choix unanime de l’atelier une des conséquences de l’actualité. Après tant de maux dus au Covid, la survenue de la guerre en Ukraine et le retour de l’inflation, il y avait dans l’équipe une envie de transmettre un peu d’optimisme ; la majorité des acceptions du verbe choisi pour thème sont en effet plutôt positives, car ludiques. Certes, nombre d’expressions courantes employées à tort ou à raison, l’instrumentalisent, le tordent, le déforment ou en tirent avantage. Entre jouer sa vie et jouer au poker, jouer son honneur et jouer au plus fin, il n’y a parfois que l’épaisseur d’une ponctuation.

 

En revanche, l’idée de pratiquer un jeu ou un sport ne prête pas à confusion. Le jeu fait en effet partie de nos vies, du hochet de l’enfance au Sudoku de la vieillesse. Il accompagne d’ailleurs l’humanité depuis la nuit des temps. Le premier jouet connu – un hérisson sur roulettes trouvé près de Suse, – remonte à 3 000 ans. Mais avant cette modeste œuvre d’un artisan perse, désireux d’enchanter un regard puéril, les bambins des âges lointains savaient déjà se saisir d’un bout de bois et de trois cailloux pour en faire la base d’un monde imaginaire aux aventures sans cesse recommencées.

La diversité des significations du verbe jouer incite toutefois à la modestie. Comme chaque fois que L’Observatoire s’est attaqué à un sujet aux multiples entrées, la rédaction reconnaît nombre de renoncements. Ainsi, malgré les… enjeux de société qu’il porte, on ne trouvera pas trace ici du jeu politique. Nous ne disons rien non plus des « jeux de mains, jeux de vilains » qui nous renverraient pourtant aux souvenirs de cours de récréation. Pas trace non plus des Jeux de l’amour et du hasard qui ont échafaudé le marivaudage ; pas de jeux de mots (laids ?) en vue, non plus.

 

 

Curieusement, pas un(e) des cinéphiles de l’atelier n’a proposé de rappeler comment, grâce à une rengaine déterrée par Narciso Yepes, le film Jeux Interdits est entré dans l’histoire. Preuve que nous manquons d’occitanistes dans la rédaction, personne n’a non plus émis l’envie de s’intéresser aux Jeux Floraux. Enfin, les plus connaisseurs de la Gironde ont laissé de côté le jeu des 1 000 bornes. Un best-seller natif du Bassin mais qui ne cesse de changer de mains. Il a quitté depuis longtemps le cadre de l’entreprise familiale pour entrer dans le giron de grands groupes. Car les jeux aujourd’hui, surtout pour les éditeurs vidéo, sont devenus une industrie dont les défis nous dépassent. Heureusement, l’été revient et les distractions insouciantes de bord de mer à base de simples instruments qui ont nom ballon, bouée, pelle et seau vont revenir nourrir les plaisirs des jeux de plage les plus simples. 

 

Jean-Paul Taillardas