Le miel de A à ZZZ...

Apiculteur dans le laboratoire (photo D.Guillon)
Apiculteur dans le laboratoire (photo D.Guillon)

    

Vous connaissez la transhumance des moutons, celle des vacanciers mais celle des abeilles beaucoup moins. Pourtant...


De mars à la fin août profitant des beaux jours, Quentin déplace ses ruchers des bosquets d'acacia odorants aux châtaigneraies fleuries puis il les achemine vers les champs de tournesol et les bruyères des landes. A l'inverse des guêpes, qui se contentent de peu les abeilles sont des gourmets. Elles ne butinent que les fleurs les plus riches en sucre.


Les abeilles

Un jeune étalon ibérique, d'un gris profond pacage sereinement, des abeilles volettent dans un rayon de soleil. Vous êtes arrivés chez Charlotte et Quentin, à un petit vol d'abeille de Grignols. Un vaste bâtiment en bois vous accueille, c'est la menuiserie. L'apiculteur y fabrique ses ruches et répare pendant l'hivernage cadres et autres accessoires. Seulement en hiver car en saison il est aussi affairé que ses pensionnaires 500 ruches soit environ 70.000 insectes. Au tout début de la ruche il y a la reine. C'est elle qui donne naissance à toutes les abeilles. Elle est née d'un œuf minuscule qui, tout d'abord droit, s’incline en trois jours  pour livrer passage à une larve. Au hasard, les nourrices ont choisi 2 ou 3 vers et décidé de les nourrir exclusivement de gelée royale secrétée par leurs glandes. Ce sirop miraculeux alimentera la reine jusqu'à la fin de sa vie. Les ouvrières scellent ensuite les cellules où en seize jours les élues vont passer de l'état de nymphes à celui d'adultes. La reine qui, après avoir rongé la cire sort de son alvéole, massacre immédiatement ses concurrentes. Deux jours plus tard elle quitte la ruche pour le vol nuptial. Les mâles, faux bourdons, se précipitent, la fécondent successivement en plein ciel et retombent éventrés. Sa spermathèque bien remplie la jeune mariée rentre au logis. Le surlendemain elle commence à assumer sa fonction de reine : pondre jusqu'à 2.000 œufs par jour. Que la reine quitte la ruche et en 2 heures toutes les abeilles la suivent. L'essaimage est un des soucis de l'apiculteur. Les habitantes de la ruche, gavées de miel et de nectar par les nourrices deviendront tour à tour : nettoyeuses, nourrices, magasinières, gardiennes puis butineuses. Rien n'est définitif. Les fonctions s'adaptent aux besoins de l'ensemble. Tous les jours les butineuses sortent récolter nectar, pollen et autres résines dans leurs bottes et dans leur jabot. Elles déposent leur précieux fardeau dans la bouche des magasinières qui le répartissent à l'intérieur. Mais le nectar récolté est très liquide, les ailes se mettent à vibrer pour la déshumidification. Etranges insectes capables de visiter 225.000 fleurs, de communiquer, de rafraîchir la ruche et même d'assurer la protection de leur lieu de vie. Autrefois leurs essaims étaient dans les arbres et nourrissaient leurs larves, aujourd'hui...


Le miel

  leur miel alimente toujours le couvain mais il régale aussi les humains. Initié à l'apiculture par son grand- père, Quentin a rencontré à Nérac un spécialiste passionné. Depuis quatre ans il a repris la route du miel, emblème de douceur et de poésie et gage de la plus extrême vieillesse au dire d'Hippocrate. Si l'hiver est la saison de l'entretien, du nettoyage et de la surveillance, l'arrivée du printemps annonce le début de l'effervescence. La nature s'éveille, la ruche sort de sa semi léthargie. Quentin a préparé des essaims, changé les reines défaillantes. Il surmonte les ruches de la hausse, le grenier de la maison. Les abeilles y déposeront le surplus de miel. A la tombée de la nuit, 80 ruches hissées sur un camion partent pour leur première transhumance vers les bosquets  de robiniers du Bordelais. A l'arrivée les cadres sont vides. Un mois plus tard le miel d'acacia récolté, les insectes repartent vers d’autres lieux :  bois de châtaigniers, tournesol,  bruyère et bourdaine. Entre chaque étape les cadres prélevés, soufflés entrent dans la chambre chaude. Le miel ne doit pas figer. Le laboratoire est moderne, les machines en inox sont neuves. On entend bourdonner une abeille, elle surveille l'extraction du miel qui commence. Une racleuse désopercule les alvéoles, les cadres sont introduits dans la centrifugeuse qui expulse le miel hors des logements. Une seconde  plus lente, le spinomel reçoit le liquide obtenu et sépare la cire restante du miel qu'une pompe déverse dans les fûts. Un ou deux jours de décantage, Quentin retire la mousse formée en surface, le liquide blond est prêt à être dégusté. De grands réservoirs partiront vers des négociants mais Charlotte garde pour elle une partie de la production. Elle a élaboré des étiquettes rustiques, simples et sur les étagères  les pots bien alignés clament leurs origines.

Produit de l'Aquitaine, issu du Lot et Garonne à la Gironde en passant par les Landes et le Gers, l'élixir de longue vie est sous vos yeux. Redevenez enfant et laissez glisserotre doigt dans un pot... un délice. Charlotte et Quentin merci.


      Dany Guillon