Rendez-vous au lion bleu

Depuis 2005, un lion d'une drôle de couleur et aux dimensions surprenantes, accueille le passant dans le quartier de la Bastide.

Le lion, sculpture de Xavier Veilhan, place Stalingrad à Bordeaux (M. Depecker)
Le lion, sculpture de Xavier Veilhan, place Stalingrad à Bordeaux (M. Depecker)

Entre immeubles et rangée d’arbres, il surgit pour nous surprendre, imposant, taillé à coup de serpe, plus grand que nature. Quel est donc ce lion majestueux qui trône sur cette place? Regard rivé sur l’horizon, rêve-t-il de la savane africaine, souhaite-t-il traverser le fleuve pour visiter la ville ou attend-il simplement une visite amicale, il a l’air de s’ennuyer un peu.

 

On le dirait sculpté dans du plastique ou peut-être dans un matériau moderne anti-tag. Il intrigue, il choque, on le trouve presque déplacé, voire extra-terrestre, dans le décor de pierre de la place. L’auteur a peut-être voulu égaler le lion de Belfort ou celui de Denfert-Rochereau. Pourquoi pas puisqu’il est sur la place Stalingrad, il honore ainsi le courage des russes vainqueurs du combat meurtrier contre les nazis. Mais pourquoi l’avoir peint en bleu ? Cette couleur laisse perplexe.

 

Il est bleu sans doute pour se fondre dans l’azur ou rappeler l’océan invisible mais proche. Le monstre est au repos et sa douce couleur le rend presque enfantin, sorti d’une bande dessinée ou descendu d’un manège, échappé d’un Disneyland ou d’un décor de cinéma. Il invite les enfants à jouer à cache-cache sous ses pattes et les passants à se réfugier sous son ventre pour se protéger d’une averse ou du soleil, à condition qu’il devienne plus familier.

 

Élégant quand ses facettes bleutées réfléchissent la lumière, le fauve bleu est-il symbole de puissance ou de protection ? Le lion est un roi vaillant qui détient le pouvoir sur sa troupe et qui la protège contre les menaces. Il peut alors être féroce mais il manque au lion bleu de la chair et du sang pour être vivant, pour rugir et faire peur. Finalement, malgré sa taille monumentale et sa crinière volumineuse aux arêtes coupantes, son allure est bien inoffensive. Alors pourquoi ne deviendrait-il pas une figure familière du quartier, un compagnon de jeu des petits et un lieu de rendez vous pour les amoureux ?

 

Marie Depecker et l’atelier de journalisme

 (Juin 2010)