Sur des arbres perchés

Des militants écologistes se mobilisent pour sauver les arbres menacés de destruction et alerter les citoyens.

 

Par Jeanine Duguet

Thomas Brail lorsde sa première action contre l'abattage de 9 platanes centenaires dans son village de la commune de Mazamet en 2019. (photo Ecologie culturelle)

De nombreux abattages d’arbres sont réalisés au profit de projets économiques dévastateurs pour l’environnement. Pour alerter les responsables politiques, devant cet état de fait, le collectif d’initiative citoyenne nommé Groupe national de surveillance des arbres (GNSA) s’est formé derrière Thomas Brail, arboriste grimpeur. Basée à L’Haÿ-les-Roses, au sud de Paris, l'association compte actuellement une cinquantaine d’antennes sur tout le territoire, dont celle de Bordeaux.

 

Livrer bataille

Proche de la nature depuis son enfance, Thomas Brail emploie un moyen inédit pour placer les décideurs en face de leurs obligations. Sa première action remonte à 2019 lorsqu’il découvre que la commune de Mazamet prévoit d’abattre des platanes bicentenaires pour aménager un parking. Il s’installe alors pendant trois jours en haut de l’un d’eux et sauve sept platanes sur neuf. Fort de cette expérience, il se mobilise la même année contre l’abattage de seize platanes à Condom. Devant l’inflexibilité du maire, il n’hésite pas à siéger pendant vingt jours en haut d’un arbre situé en face du ministère de l’écologie. Il sera alors reçu par Élisabeth Borne, alors ministre de la Transition écologique et solidaire. Un peu plus tard, il réitère son action en allant jusqu’à faire la grève de la faim cette fois à proximité de la tour Eiffel pour demander le retrait total du projet de réaménagement des alentours. Une vingtaine d’arbres doit disparaître dont deux bicentenaires au profit de la construction d’une consigne à bagages pour les touristes. Il est alors reçu par Amélie de Montchalin ministre de l’Écologie et Marc Fesneau ministre de l’Agriculture, pour travailler sur la protection des arbres. L’initiative fait le buzz, des personnalités, des scientifiques, des artistes le suivent dans cette bataille.

 

En Nouvelle-Aquitaine

Rachel Blais, co-référente de l’antenne bordelaise, fondée en 2024, nous décline quelques-unes des missions que s’assigne le groupe dans le Sud-Ouest. « Il n’y a pas que des grimpeurs également appelés écureuils » À la suite d’alertes citoyennes, l'association apporte son expertise et propose des leviers juridiques afin de contrer des projets destructeurs pour la biodiversité. C'est une grosse partie de son travail. Ses membres soutiennent d’autres mouvements écologiques qui interviennent sur des programmations de grande ampleur comme la LGV Bordeaux-Toulouse, la ligne à très haute tension de 400 000 volts ayant pour objectif de relier le nord de la Gironde au nord de l’Espagne, impactant les écosystèmes marins et la forêt landaise. Une commission forêt s’est constituée pour lutter contre l’installation de centrales industrielles de panneaux photovoltaïques en milieu naturel. « Produire de l’électricité verte, oui, mais pas en détruisant les forêts, les prairies ou les zones humides. Il faut savoir que le sol doit être travaillé en profondeur avant la pause, détruisant ainsi irrémédiablement l’écosystème, alors qu’il y a des friches industrielles, des parkings ou autres espaces déjà impactés qui pourraient les accueillir. » expliquent ces militants.

La communication est tout aussi importante que les actions de terrain : ils ont participé au festival Climax, à Darwin, organisé la conférence S’engager pour le vivant avec Thomas Brail, Jérôme Santolini, biochimiste, Aurélie Bugeau, professeur à l’Université de Bordeaux, tous deux membres de l’Atelier bordelais d’écologie politique et de Scientifiques en rébellion. Ils étaient présents également à l’Utopia pour le film L’usage du monde et au concert d’Emily Loiseau donné au Rocher de Palmer. En février 2025, l’Utopia organise le festival Vrai de Vrai. Il y sera diffusé La guerre des arbres, réalisée par Clarisse Feletin. Les écureuils Thomas Brail et Tanus participeront au débat après la projection.

 

 

 

Diffusés sur toute la France, les concerts de Patrick Scheyder nous rappellent que l’écologie n’est pas une invention de notre époque. Ses spectacles mêlent musique et textes littéraires judicieusement choisis. Dans George Sand et la défense de la forêt de Fontainebleau, il démontre qu’au XIXe siècle, des artistes, des écrivains et des peintres se mobilisaient déjà pour dénoncer la déforestation :

« Un arbre est un édifice, une forêt est une cité et, entre toutes les forêts, la forêt de Fontainebleau est un monument. Ce que les siècles ont construit, les hommes ne doivent pas le détruire. » Victor Hugo

« Le dépecer, le vendre, c’est l’anéantir, et je n’hésite pas à jurer que c’est là un sacrilège... Si on n’y prend garde, l’arbre disparaîtra et la fin de la planète viendra par desséchement, sans cataclysme nécessaire, par la faute de l’homme. » Georges Sand, à propos de la forêt de fontainebleau. 

 

 

Réveiller les consciences

Outre ces actions ponctuelles, l’association s’est donnée comme missions d’éduquer les jeunes générations avec un projet, un arbre, une école ; de réveiller la conscience collective en fédérant tout mouvement qui œuvre pour la reconnaissance du droit de l’arbre et la préservation de la biodiversité ; d’alerter par tout moyen pacifique, un large public sur l’importance de la protection de l’arboriculture comme participer à des débats, des conférences et même des spectacles. Par exemple, Patrick Scheyder, pianiste, membre du mouvement Écologie culturelle, est à l’origine de plusieurs concerts dont George Sand et la défense des arbres dans la forêt de Fontainebleau et L’éloge de la forêt au cours desquels Thomas Brail devient récitant et chanteur en compagnie d’acteurs connus comme Jean Claude Drouot, Emma Varich. Mais ils demandent aussi le respect des lois existantes et le renforcement de la L350-3 du code de l’environnement qui protège les arbres d’alignement. Ils suggèrent une loi encadrant la production industrielle des forêts de monoculture.

 

 

Rachel Blais lors d'une conférence organisée par le GNSA

GNSA Bordeaux

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GNSA

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