Halte au feu
En Nouvelle Aquitaine, la forêt est protégée contre l’incendie par un dispositif unique en Europe.
Par Roger Peuron
Toutes les photos sont de DFCI
Dans le massif des Landes de Gascogne, la prévention des incendies est assurée par une association des propriétaires forestiers : la Défense de la forêt contre l’incendie[1] (DFCI). Fondée il y a plus de 70 ans, cette institution originale regroupe plus de 210 associations syndicales autorisées (ASA).
Forêt ouverte
Ce massif forestier, situé dans trois départements, les Landes, la Gironde et le Lot-et-Garonne, constitue la plus grande forêt d'Europe de l'Ouest, essentiellement artificielle, avec une superficie de 1 300 000 hectares (120 fois Paris). Elle a été créée au XIXe siècle sur des terrains sableux ou marécageux assez pauvres. Elle appartient pour 90 % à des propriétaires privés. Elle est plantée très largement de pins maritimes dont l’exploitation nourrit une filière bois qui représente plus de 34 000 emplois.
En dehors de cette fonction économique importante, elle constitue, pour Bernard Barbeau, président de l’ASA de Saint-Aubin-de-Médoc de la DFCI « une vaste aire de jeux pour les promeneurs, les cavaliers, les vététistes, les chasseurs ou encore les cueilleurs de champignons. C’est une forêt ouverte, ajoute-t-il sans quasiment de clôture. Mais elle doit faire face à des ennemis redoutables parmi lesquels les incendies. »
Association de propriétaires
« Depuis les feux de 1949 qui ont vu brûler 100 000 hectares et ont surtout coûté la vie à 82 sauveteurs, il y eu une prise de conscience ajoute M. Barbeau. Il fallait organiser la forêt pour la protéger. Il était nécessaire de faciliter l’accès des moyens de lutte pour combattre les incendies. Tout un réseau de pistes forestières et de pare-feux a été créé. Ces moyens sont utilisés pour son exploitation, mais surtout pour permettre aux services de secours d’atteindre au plus vite les feux naissants. ». La DFCI a alors été créée. C’est une association de propriétaires qui payent une taxe, proportionnelle à la surface qu’ils possèdent, à laquelle s’ajoutent des subventions de la région Nouvelle-Aquitaine, de l’État et de l’Europe. C’est un cas unique : ailleurs la prévention est totalement assurée par des financements publics.
Une réflexion
Depuis son origine, la DFCI a créé et entretient 42 000 kilomètres de pistes, 17 000 kilomètres de fossés, 6 000 points d’eau. Par ses actions de prévention, elle protège également les habitants proches, la faune et la flore.
Les incendies de l’été 2022 en Gironde, qui ont brulé 30 000 hectares et provoqué 50 000 évacuations préventives d’habitants n'ont causé heureusement aucune perte humaine. Mais ils ont débouché sur une réflexion. Pour Bernard Barbeau, « les sylviculteurs doivent s’interroger sur la façon de reboiser, par exemple, ne plus planter ou semer au ras des routes, ses usagers étant souvent à l’origine des incendies. Une distance minimale de 4 mètres de part et d’autre doit être respectée. » En outre, des moyens aériens supplémentaires ont été mis en place et les crédits pour compléter les moyens de lutte et de prévention au sol ont été augmentés.
Grâce à ses 2 500 bénévoles qui œuvrent au quotidien, la DFCI fait le maximum pour protéger le massif forestier des Landes de Gascogne.
Ill existait déjà, en certains endroits, depuis la fin du XIXe siècle, une DFCI qui assurait seule la prévention mais aussi la lutte contre les feux de forêt avec des moyens souvent dérisoires, en l’absence du corps de sapeurs-pompiers.