Zacharia Zorin, violoniste dans l'âme

Zacharia Zorin en compagnie de Mstislav Rostropovitch (D.R.)

Un parcours exceptionnel d’Odessa à Bordeaux.

 

Enjoué et les yeux rieurs, Zacharia Zorin accueille ses visiteurs avec des propos plein d’humour. Son destin est forgé par les rencontres qui ont marqué les étapes de sa vie.

Né en 1940 à Odessa, il est remarqué pour son talent musical précoce. Il bénéficie d’une excellente formation avant de s’imposer parmi les meilleurs violonistes de l’Union Soviétique. En 1974, il émigre en Israël et devient soliste de son Orchestre Philarmonique. Il est repéré en 1979 par Roberto Benzi qui recherche un 1er violon pour l’Orchestre National de Bordeaux Aquitaine.

Depuis 2000, il est directeur artistique des Rencontres musicales internationales des Graves*.

 

Jeune violoniste prodige

À 5 ans, un musicien décèle ses dispositions pour la musique en l’entendant chanter dans la rue. Il lui donnera ses premiers cours de violon en échange d’une assiette de soupe partagée avec la famille ! Très vite, il se révèle un violoniste prometteur, dans un milieu musical favorable avec un père pianiste amateur. D’instinct, il a la capacité de reprendre un air joué sur un autre instrument.

Zacharia accède à 7 ans à l’École Stolarski, réputée pour les enfants prodiges. Elle a formé de grands noms tels Nathan Milshtein, David Oïstrakh. Après un concours difficile, il y reçoit une éducation générale le matin et l’après-midi une formation musicale rigoureuse. Parallèlement, il devient un très bon joueur d’échecs, affrontant même plus tard, les plus grands maîtres.

À 18 ans, il entre au Conservatoire d’Odessa et devient en 3e année, soliste de son Orchestre Philarmonique. Il est rapidement un des musiciens les plus réputés et se produit partout en Ukraine. Devant l’insistance d’un professeur ami, il intègre en 1968 l’Institut Gnessin de Moscou et obtient en 1970 son doctorat tout en se produisant comme soliste concertiste au sein de l’agence artistique Moskoncert.

Sur les conseils de David Oïstrakh, il rejoint comme professeur le Conservatoire de Novossibirsk en Sibérie et l’Orchestre Philarmonique comme soliste.

Pour ne pas être embrigadé, il a toujours refusé d’adhérer aux Jeunesses communistes et au Parti. Malgré ses succès, cela lui vaut un ostracisme certain. Candidat à l’émigration en Israël, il est déchu de la nationalité soviétique et voit immédiatement son poste supprimé. Arrivé le 1e février 1974, il intègre rapidement l’Orchestre Philarmonique de Tel-Aviv dirigé par Zubin Mehta. Sous la baguette des plus grands chefs dont Léonard Bernstein et Daniel Barenboïm, il se produit dans le monde entier.

 

Bordeaux, terre d’accueil

Un jury exigeant l’attend à l’ONBA qui sélectionne sur 4 épreuves, par élimination successive. Les candidats jouent des œuvres de Bach, Mozart, puis de la musique romantique et au final se produisent comme 1er violon solo de l’orchestre.

Zacharia Zorin est nommé en 1980 « violon solo, super soliste ». Il y restera jusqu’en 2005 tout en s’investissant ailleurs, 1er violon solo à l’Orchestre National de Montpellier, professeur au Conservatoire de Limoges et à l’Institut professionnel du violon de Bordeaux. Il participe à de nombreux récitals dans des festivals internationaux avec sa compagne Zoya, pianiste, ainsi qu’à des tournées avec plusieurs orchestres symphoniques d’Europe.

Son ami Mstislav Rostropovitch le découvre en 1963 en présidant le grand jury du Conservatoire d’Odessa. Ils se retrouvent fréquemment, notamment en 1989 pour une tournée en Union Soviétique qui s’ouvre aux dissidents après la Pérestroïka. Leur passion pour la musique et leur parcours contribuent à leur complicité.

Avec son soutien et ceux d’André Lurton, fondateur de l’AOC Pessac-Léognan et Francis Boutemy, propriétaire du Château Haut-Lagrange, il crée en 2000 avec Zoya Zorin les Rencontres musicales internationales des Graves. Labellisé depuis 2002 Scènes d’Été en Gironde, cet événement est désormais incontournable. Msistlav Rostropovitch en devient président d’honneur en 2003.

Zacharia Zorin fête cette année ses 75 ans, entouré de sa famille, ses amis et ses anciens élèves. Professeur apprécié par des étudiants venant de différents horizons, il demeure un artiste sollicité, en particulier dans les pays qu’il a marqué de son passage.

François Bergougnoux

* Festival 2015 du 20 au 30 juillet 

Pour en savoir plus : www.musiqueengraves.com