Ebola

13 Juillet 2014, jour de la finale de la coupe du monde de football. L’épidémie de fièvre Ebola qui a émergé des forêts de Guinée commence à prendre de l’ampleur en Afrique de l’ouest.

 

Á Bangachi, un bidonville de Conakry, la vie continue. Sans eau, sans électricité, sans travail, trop souvent…Au café, les hommes fatalistes palabrent de la propagation du virus, du match Allemagne-Argentine, du président Alpha Condé et du docteur Be Ku*. Il n’est pas question de se faire servir la boisson dont on meurt d’envie par cette chaude journée de fin de ramadan. À 19 h, ils iront à la mosquée pour faire la prière avant de rompre le jeûne en guettant l’heure affichée par l’Imam.

Photo D.R.
Photo D.R.

Les femmes ne vont pas au café, pas le temps, pas l’habitude, elles se débrouillent beaucoup plus efficacement que les hommes, à vendre des choses au marché, à organiser associations et tontines comme elles appellent leurs mini banques autogérées qui servent à s’entraider à tour de rôle. Inquiètes au sujet du virus, elles font provision de produit désinfectant et de savon. Elles attendent d’avoir vendu pour pouvoir acheter et préparer ce soir un repas de fête.

Les hommes repus reviendront peu à peu s’entasser au café et sur le trottoir, les visages rivés sur la petite télé pas très nette, qui grésille.

 

8 août 2014.

Le directeur général de l’OMS déclare que l’épidémie constitue une urgence de santé publique de portée internationale. Elle inquiète les spécialistes car c’est aussi la première fois que la pandémie prospère en milieu urbain.

En 1976, Peter Piot, médecin belge spécialisé en médecine tropicale découvre le virus de la famille des filovirus (ver) au Zaïre, l’actuelle République du Congo, à Yambuku, situé près de la rivière Ebola qui lui donna son nom.

Ebola est endémique en Afrique subsaharienne, il réapparaît à intervalles réguliers : 2 200 morts en 40 ans, soit beaucoup moins que le paludisme et le sida. La dernière résurgence en Guinée forestière s’est propagée au Libéria et en Sierra Léone ; ces pays ont des systèmes de santé très fragiles, manquent de ressources humaines et d’infrastructures et sortent à peine de longues périodes de conflits ou d’instabilité.

Fortes fièvres, hémorragie interne, saignement des muqueuses, sueur, vomissements diarrhée : contagion maximale par contact avec les proches et le personnel soignant avec un taux de mortalité de 50 à 90 %. Le travail du personnel de santé est aussi compliqué par la méfiance de la population locale vis-à-vis des soignants occidentaux… En Afrique, on ne meurt pas à l’hôpital… Les cadavres restent contagieux et le rituel funéraire jouerait un rôle très important dans la propagation.

 

Actuellement.

Il n’existe pas de vaccin, mais il y a plusieurs traitements à l’essai. Depuis novembre, un médecin suisse sert de cobaye. On se contente d’hydrater les patients par intraveineuse et de les isoler. Les victimes croissent de façon exponentielle, les pays essaient de maintenir la population dans leurs frontières, les aéroports filtrent les voyageurs atteints de fièvre.

Après de nombreuses supputations où la théorie du complot a même était évoquée, on sait aujourd’hui que les chauves-souris frugivores sont des hôtes naturels du virus Ebola. Celui-ci s’introduit dans la population humaine par contact étroit avec des animaux : singes, antilopes de forêt, porcs-épics etc. Ces viandes sont consommées souvent crues ou pas assez cuites. La durée d’incubation varie entre 2 et 21 jours.

L’Occident s’est préoccupé de cette pandémie parce qu’il a eu peur. Mais les trois ou quatre cas soignés et guéris en Europe, et les annonces de l’OMS comme quoi il y a peu de chance qu’elle se propage hors de l’Afrique, ont vite calmé l’hystérie populaire.

 

À ce jour, 8 500 morts

Ce qui pourrait paraître, sur le papier, comme une course contre la montre n’en est pas une ! Pourtant il est temps que ce fléau s’arrête et que les chercheurs du monde entier trouvent le moyen d’endiguer cette maladie, qui, hélas n’est pas la priorité des laboratoires ! Le paludisme, plus gros tueur des pays en voie de développement est un bel exemple du non intérêt de ces derniers.

Paule Burlaud

 

*Le président Alpha Condé est un ami d’études de B. Kouchner, ce dernier a rassemblé les fonds pour la construction d’un centre médical communal. Tout est fin prêt, inauguré. Chaque semaine, on annonce l’ouverture mais il reste à obtenir la décision de rémunérer les médecins…