Miam-miam

Comment mangerons-nous demain sur un territoire urbain d'un million d'habitants ? Bordeaux y réfléchit et se prépare au travers d'innovations parfois originales.

 

 

 

Dans le cadre du PAT (projet alimentaire territorial à vocation sociale), la ville de Bordeaux, son CCAS* et Bordeaux Métropole mènent une politique volontariste visant à permettre à tous l'accès à une alimentation saine et durable grâce à des produits de qualité, de saison, traçables et sans transports longs. Des associations et de petites entreprises sont, elles aussi, à la pointe de l'innovation pour promouvoir une forme d'agriculture urbaine avec « moins de km dans mon assiette ».

 

 

 

MIAM et CCAS

 

Au Centre social de Bordeaux-Nord, Yassir Yebba, cuisinier devenu anthropologue, a décidé de mettre la main à la pâte. En créant la MIAM, Maison interculturelle de l'alimentation et des mangeurs, il souhaite développer « le bien-vivre par le bien-manger » en particulier au profit des populations vulnérables. « Manger, c'est la sociabilité, le bien-être, le plaisir et le symbolique » dit-il pour asseoir son action : créer un lieu de diffusion, de formation et de mutualisation autour de l'alimentation durable. Pour cela, à Bordeaux-Nord, on fait des achats groupés, on découvre des recettes économiques, différents modes de cuisson et de conservation et surtout, on retrouve le plaisir des repas partagés. MIAM lutte aussi contre le gaspillage en transformant des fruits et légumes locaux en surplus ou invendus chez les producteurs. « Alors, à table, citoyens ! » s'écrie Yassir Yebba. Miam, on va se régaler...

 

 

 

MIAM et la Maison écocitoyenne

 

Fidèle à son engagement pour le développement durable, la maison écocitoyenne présente MIAM, une exposition sous-titrée « Mangeons grâce aux initiatives d'alimentation en mouvement ». Un parcours tout public dresse un état des lieux : rareté du foncier, qualité des sols, circuits de production et de vente, impact sur l'économie et la santé...

 

Mais on y découvre aussi nombre de pistes pour relever les défis des transitions écologique et énergétique et la relocalisation des systèmes alimentaires y apparaît comme une nécessité absolue. MIAM est l'occasion de prendre conscience de l'importance des produits locaux, de la nécessité de respecter le rythme des saisons et surtout de laisser libre cours à son imagination pour inventer un monde alimentaire nouveau au plus près des consommateurs.

 

 

 

Les nouveaux cultivateurs

 

Seuls ou en petites structures, ils explorent de nouveaux modes de culture et de distribution. Près de Créon, c'est la ferme De l'eau à la bouche qui pratique l'aquaponie. Greg explique : « Nous élevons des poissons et faisons pousser des légumes hors-sol en circuit fermé. C'est un cercle vertueux où on utilise les déjections des poissons, dégradées par des bactéries, comme engrais pour les plantes qui purifient l'eau pour les poissons ! Avec 1 400 truites, que nous commercialisons aussi, nous produisons par semaine 300 kg de légumes vendus localement. »

 

À Bordeaux même, c'est au niveau – 6 du parking de la Cité mondiale que s'est installée La cave à pleurotes. Les champignons sont cultivés dans des sacs contenant de la paille et surtout du marc de café récupéré dans les bars. Les pleurotes trouvent preneur chez les restaurateurs bordelais ravis de leur fraicheur. Plus branchée,  une autre initiative de production locale en vente directe avec une touche de virtuel et un slogan ludique : « Mon potager.com ramène sa fraise à Bordeaux ». On crée sa parcelle de potager sur le site internet, on choisit son abonnement et on laisse les producteurs travailler puis vous livrer en point relais fruits et légumes de saison. À Darwin, c'est Romain Tiers et L'essaim de la reine qui, dans ses ruchettes, pratique l'élevage et la production d'essaims pour les apiculteurs. À Villenave d'Ornon, la ferme de Baugé produit du fromage de chèvre, vendu en circuit court, sur un terrain mis à disposition par la ville. Bien d'autres projets portés par des particuliers et des associations éclosent un peu partout en Gironde, bonne élève en la matière. L'agriculture urbaine suscite un bouillonnement d'initiatives plus ou moins viables, en tout cas, elle a le mérite de poser la vraie question : « Dis-moi ce que tu manges et je t'en dirai l'impact environnemental et les effets sur ta santé »

 

Quelles réponses l'avenir retiendra-t-il ?

 

 

 

Claudine Bonnetaud