Parole de profane

La musique occupe une place à part dans le domaine de l’art et si un profane impénitent se glissait dans cet univers.

Jean-Sébastien Bach, Gioachino Rossini, Félix Mendelsohn

L’Observatoire, journal de la culture et de la curiosité, a découvert un espiègle et candide postulant à l’initiation musicale, de cette expérience est née une interview très particulière.

 

Choc de culture

 

L’Observatoire : Quelles sont vos bases musicales ?

Le profane : Jusque-là pour moi, Beethoven était un chien de cinéma, Berlioz un des chatons des Aristochats, naïvement, je pensais rire sans retenue à l’Opéra Comique, tout à fait Omar Sy dans une scène des Intouchables.

 

Que retenez-vous de nos grands compositeurs ?

— Je suis surpris par Jean-Sébastien Bach, cet austère luthérien, spécialiste des fugues et de la musique de chambre, il a eu vingt enfants avec deux épouses, sans discussion Bach avec mention. Chopin aimait jouer un air polonais Le houblon, il est l’auteur d’une Marche funèbre où il est bien sûr question de bière. Le romantisme de Beethoven est mis à mal par son patronyme signifiant en allemand Jardin aux betteraves.

 

Désarmant, mais encore ?

— Antonio Vivaldi devrait avoir son lot d’admiratrices parmi les marchandes des quatre saisons. Je suis épaté par les Yohann Strauss, La marche de Radetzky pour le père, 170 valses dont le Beau Danube bleu pour le fils, si bien qu’aujourd’hui même Manuel…Valls. Et puis, Richard Strauss, son Chevalier à la rose aurait pu être un autre Strauss… Kahn, celui-là, c’est pourtant Igor Stravinsky qui composera l’opéra Le Libertin.

 

Restons sérieux, que vous inspire Saint-Saëns ?

La truite de Schubert, La chauve-souris de Strauss fils, La pie voleuse de Rossini, L’aigle noir de Barbara méritaient d’entrer dans son Carnaval des animaux.

 

Une sympathie particulière ?

— Rossini me plait, épicurien, amateur de zarzuela, il tourne le dos à Wagner dont il dit : « Wagner a des minutes délicieuses et des heures épouvantables », heureusement Mozart est là et le Barbier de Séville ne rase pas.

Génial aussi que le rugby réunisse deux compositeurs comme Arthur Honegger et Marc-Antoine Charpentier, l’un pour son poème symphonique Rugby joué au stade de Colombes, l’autre pour son Te Deum, générique de l’Eurovision et hymne du Tournoi des cinq nations. Reconnaître La sarabande de Haendel dans le Barry Lyndon de Kubrick m’a procuré un vif plaisir.

 

Prémonitions

 

 — Certaines œuvres vous paraissent prophétiques ?

— Oui, je m’interroge, le Spectre de la rose de Berlioz préfigure-t-il une inquiétude en politique ? Quand Beethoven compose l’Ode à la joie sur un texte de Schiller aurait-il apprécié qu’elle devienne l’hymne européen, lui qui nous propose les Ruines d’Athènes en 1811 ? Et puis, de la Marche nuptiale de Mendelssohn à la Veuve joyeuse de Frantz Lehár, il n’y a qu’un pas.

 

Vous préférez la musique moderne ?

— Plutôt le jazz et les caves de Saint-Germain des Prés que les concerts de la salle Gaveau, je rêve d’un bœuf virtuel entre Duke Ellington, Count Basie et Louis Armstrong. Armstrong, quel nom prédestiné, les premiers pas sur la lune, sept tours de France et Satchmo qui joue si bien de la trompette ! J’aime la musique de variétés mais quand Tino Rossi chante Marinella de Vincent Scotto, il semble célébrer le Front national, j’ai aussi la faiblesse de préférer La mer de Trénet à celle de Debussy.

 

Vous allez choquer les mélomanes.

— Pensez au Pays du sourire, Mozart, Haydn, Satie, Offenbach ont de l’humour. Erik Satie a pastiché Chopin et sa révolte contre l’académisme musical me séduit.

La musique appartient à tout le monde, les politiques l’utilisent, Clinton joue du saxophone, Giscard de l’accordéon, c’est son oui mais musical, Copé nous fait du syncopé sur son piano…

 

Alors, enrichissement culturel ou pas ?

— En passant de L’opéra de 4 sous au concert à cymbales… Pour être franc, la musique sacrée ne m’a pas convaincu mais j’ai découvert de sacrées musiques.

 

Comptant sur votre mansuétude, nous mettons un terme à un entretien imaginaire qui n’avait pour ambition que de vous distraire.

Nietzche a dit : «  Sans la musique, la vie serait une erreur. » Nous partageons cet avis éclairé.

Claude Mazhoud