Bègles, du rouge au vert

Le Delta vert, un cadre de vie attractif au bord de la Garonne sur la commune de B'gles(phto D. Sherwin-White)

Découvrir la transformation d’une ancienne ville populaire et ouvrière qui a su porter une politique écologique sans renier ses origines

Une balade à vélo sur le Delta vert béglais, c’est redécouvrir les berges de la Garonne au naturel, la biodiversité girondine et le bonheur de cheminer dans un cadre serein et paisible, sans se soucier des voitures et être dérangé par la circulation. Bègles a été repensée pour offrir l’un des cadres les plus attractifs de la métropole bordelaise pour celles et ceux qui souhaitent concilier ville et nature. Les nostalgiques de la campagne et les angoissés de la concentration urbaine y trouveront une alternative plaisante au tout bitume et aux longues heures de transport journalier.

Mais comment une ville ouvrière dont l’étalement urbain était l’un des plus importants de la métropole, a-t-elle pu se transformer à ce point ?

 

Jeu d’équilibriste entre confort de vie pour toutes et tous et densité urbaine

En écoutant certains élus locaux, on est tenté de croire qu’il est compliqué de répondre d’un côté aux enjeux de densification urbaine et de développement économique, de l’autre à la préservation de l’environnement et au maintien d’un cadre de vie agréable pour chacun. « Ce n’est pourtant pas si difficile que ça » estime Noël Mamère, maire de Bègles de 1989 à 2017. « Lorsqu’on est maire, on a la maîtrise de l’urbanisme. »

Son équipe municipale, composée d’écologistes et de divers gauche a fondé son action autour de trois axes : l’enrichissement de l’offre de transports en commun, la rénovation urbaine et la requalification de friches industrielles. Le quartier Terre-Neuve a par exemple été désenclavé en créant la station de tram du même nom et en supprimant les quatre tours de la cité Yves-Farge. « Nous avons gardé l’ensemble des familles de la cité et les avons relogées. Il était hors de question de se débarrasser socialement des familles pouvant être considérées comme problématiques. » précise Noël Mamère.

Les promoteurs et les bailleurs sociaux se sont également vus imposer des conditions strictes d’aménagement telles que le nombre d’étages des immeubles (limité à 4), la part de logements sociaux ou la création d’un logement destiné aux assistantes maternelles par bâtiment afin de ne pas étouffer la nature, permettre la mixité sociale et la venue des familles avec enfants en bas âge.

Lorsque cela était envisageable, des équipements nécessaires à la densification urbaine ont été réalisés pour créer des lieux pour tous : par exemple un simple bassin de rétention d’eaux pluviales visant à éviter l’inondation de l’autoroute a été transformé en base de loisirs avec une zone de baignade. Bègles-plage était née.

 

 

La nature en toile de fond

La commune l’avait compris avant les autres villes françaises : la densification ne doit pas se faire au détriment des espaces verts. Respecter la biodiversité, favoriser les espaces naturels et le contact des habitants avec la faune et la flore sont non seulement salvateurs pour leur confort de vie mais contribuent aussi à lutter contre les impacts du réchauffement climatique. Entre autres mesures, un arbre coupé doit être compensé par 3 arbres plantés, dont un arbre fruitier et chaque logement construit s’accompagne obligatoirement de la plantation d’un arbre d’essence locale.

Cette politique ambitieuse paie : la ville compte 40 m2 de nature par habitant contre un objectif national de 25 m2 pour les zones périurbaines. Elle est reconnue (plusieurs prix et labels récompensent la commune) et se poursuit, notamment autour de projets agricoles ou de la création d’une charte de l’urbanisme avec un axe sur la protection de la biodiversité. Grâce à des jardins partagés et des places paysagées, les citadins sont amenés à se rapprocher de la nature.

Les écologistes convaincus seront néanmoins frustrés de constater que la part des espaces réservés aux voitures est encore trop importante et que les zones piétonnes ou cyclistes restent traversées par les axes routiers : changer la morphologie d’une ville et les habitudes des habitants nécessite du temps et de la persévérance.

 

Zoom sur le Delta Vert (à mettre en encart)

Peu connu des habitants de la métropole bordelaise, le Delta vert s’étend sur 200 ha couvrant la moitié sud de Bègles. À vélo ou à pied, cette zone offre une boucle de 15 km au cœur de la nature, des berges de la Garonne au parc Mussonville en passant par le parc de l’Estey, Bègles-plage et le parc du château de Francs.

En développant cette zone, la municipalité visait un double objectif : offrir un espace de respiration aux habitants d’une ville qui se densifie tout préservant la biodiversité. De longs et pénibles efforts sont encore nécessaires pour mener à bien ces chantiers. Ils passent notamment par la finalisation du parc des Berges de la Garonne, l’augmentation du réseau de pistes cyclables et le développement de zones agricoles responsables : les Béglais pourront voir en ville des éco-pâturages.

 

 

Marion Stauri