Arpenteur du pavé bordelais

Yves Simone, figure emblématique de notre cité, est un guide singulier avec son chapeau moitié chinois/moitié breton et sa tenue customisée inimitables.

Qui ne connait pas Yves Simone à Bordeaux ! Son passage sur TV7 a décuplé sa notoriété. Conteur hors pair, il passionne les visiteurs de notre ville depuis 40 ans. Premier guide à créer les visites à vélo il y a 30 ans, puis les visites nocturnes, en costumes, théâtralisées…, il peut toujours déclamer près de 500 vers d’auteurs amoureux de Bordeaux.

Il accueille au café Chat Noir Cha Vert, un de ses ports d’attache favoris, près de la Basilique Saint Michel. Ce quartier, un des rares qui conserve ses racines populaires, lui rappelle le Bègles de son enfance auprès de son père fervent communiste et le Bordeaux des années 80.

 

Fan de rock

Passionné de Jules Verne, Yves fait du théâtre à l’école primaire et aime déjà prendre la parole. Après le collège à Bègles où il pratique la course de demi-fond et lit beaucoup, il rejoint le lycée Magendie. Travaillant peu, seuls les cours d’histoire et de français l’intéressent. Il obtient péniblement son bac tout en rêvant de partir à l’aventure.

Très branché sur les musiques anglo-saxonnes, il se rend aux États-Unis à 19 ans en 1978. Maîtrisant très mal la langue, il est confronté brutalement aux difficultés d’échanger avec ses interlocuteurs. « Lesté de ma bonne mine et de la bonne réputation de Bordeaux, je m’adapte assez vite après un début chaotique. Je parcours le pays pendant sept mois. Peu d’américains connaissent vraiment la France et je découvre une Amérique bien loin de celle de mes rêves. C’est quelque fois la galère mais je vis le plus souvent de belles aventures. Couchant parfois à la belle étoile, je suis souvent accueilli pour manger et passer la nuit chez des particuliers qui m’ont pris en stop ! »

 

Un personnage

Redécouvrant Bordeaux à son retour en 1979, il éprouve une véritable passion pour son architecture. « J’entame des études d’histoire à la Faculté mais sans doute perturbé par ma consommation trop assidue de haschisch, que je regrette depuis, je peine à me concentrer et n’arrive pas à les mener à leur terme ! » Il décide parallèlement de passer le concours de guide dès 1982, sans se douter que c’est le tournant de sa vie.

« Me rêvant prof de fac, je reste quelques années déçu de m’en tenir à ce métier malgré la passion grandissante. Pour mieux me distinguer et pouvoir exercer dans la rue en toute situation climatique, je me forge un personnage : un couvre-chef original pour protéger ma calvitie, un parapluie avec un joli pommeau, un blouson et un pantalon plein de galons dorés et un porte cartes pour mieux informer les visiteurs. Un vieux vélo plein de colifichets m’accompagne, traduisant avant l’heure mon approche écologique. »

Son chapeau est orné de deux rubans couleur de vin et d’une belle visière. Il est en paille l’été, en feutre l’automne et le printemps, doublé d’une calotte l’hiver. Il est totalement bordelais, conçu par Yves et fabriqué par Michèle-Françoise, modiste aux Chartrons.

 

Une parenthèse

« Ma collaboration avec TV7 commence en 2002. Elle se traduit très vite par une émission Suivez le guide de treize minutes, entièrement consacrée au patrimoine bordelais. Cela me demande un travail de préparation important, pour la recherche de sujets, les repérages sur le site présenté, l’écriture du script... » Malheureusement l’audience de TV7 baisse en changeant souvent de canal dans un monde télévisé de plus en plus concurrentiel. Cela représente 17 ans d’un travail apprécié des bordelais et 540 émissions à la gloire de Bordeaux.

Pour mieux défendre ses idées sur l’aménagement de la ville, Yves se présente aux municipales en 2014. Décidé tardivement, il peine à rassembler les 61 membres nécessaires pour déposer une liste crédible. Déçu de ses 2,8 %, il aurait apprécié de faire 5 % pour siéger au Conseil. Une de ses idées phares est la réalisation d’un passage souterrain pour les voitures entre le miroir d’eau et la place de la Bourse, pour mieux profiter de ce bel espace piétonnier.

« J’assume mon accoutrement et je revendique mon côté bonimenteur, même si au fond je suis davantage un guide épris de culture, soucieux de faire partager ma passion pour l’architecture bordelaise. »

 

 

François Bergougnoux