Novateur et instructif

Le Jardin botanique de Bordeaux est moderne et innovant. Avec le bâtiment et les serres qui le complètent, il constitue un lieu cultivé autant que culturel.

 

Dès 1995, l’aménagement de la rive droite de la Garonne était une des priorités de la nouvelle municipalité de Bordeaux conduite par Alain  Juppé.

 Parmi les projets figurait en bonne place celui d’un jardin botanique en lieu et place d’un ancien site industriel. Le cahier des charges lui assignait une orientation pédagogique et de participer à la reconversion économique et sociale du quartier. La paysagiste, Catherine Mosbach, et l’architecte, Françoise-Hélène Jourda  ont alors relevé le défi, ce qui leur a valu le prix européen du paysage Rosa Barba. 

Des voisins chanceux

Un quart de siècle plus tard, alors que les sorties sont limitées pour cause de confinement les habitants des nombreux immeubles qui bordent ce jardin novateur et instructif, peuvent, grâce à lui,  se promener, s’aérer, courir, photographier, profiter des belles couleurs des végétaux

 Ils peuvent suivre le cheminement conseillé : partir des berges de Garonne, emprunter l’entrée aux portes monumentales, pour découvrir les bassins aux végétations aquatiques, première vie végétale apparue sur terre.

 En cette saison froide, seules les mouettes colonisent ces plans d’eau. La galerie des milieux reconstitue onze paysages, les écosystèmes de la région Aquitaine, dunes, pins, chênes, fougères, bruyères…

Dans ces espaces, une dizaine d’étudiants ont organisé un échauffement en musique. Le promeneur découvre, plus loin, le champ des cultures : légumes, fruits, plantes aromatiques, tinctoriales, huiles essentielles…  En suivant l’allée qui longe le mur d’enceinte, orienté plein Sud, des plantes grimpantes, lianes à vrilles, à crochets, à tiges qui s’enroulent autour du support. Au détour d’une allée, un massif de camélias dont les premières fleurs s’épanouissent. Des arbres fruitiers complètent cette déambulation.  De même que le jardin, les serres ont une vocation scientifique et pédagogique. D’ailleurs, l’Université du temps libre de Bordeaux a bénéficié de visites guidées, d’échanges sur les plantes et les spécialités culinaires d’un pays et d’enseignements de la botanique depuis 2013.  De nombreuses actions auprès des scolaires sont organisées. Dans le jardin, mais aussi durant les classes vertes dans la réserve écologique des Barails, situé au nord de Bordeaux, où des animateurs de la cité botanique interviennent.

 Réchauffement climatique

En revanche, les bâtiments et serres sont fermés à cause de la pandémie. Il faut se contenter du « jardin chez soi », en parcourant le site web et les vidéos. Des photographies étaient visibles, avant le confinement et jusqu’au 30 janvier : celles de Thomas Balaÿ, diplômé en agronomie.. «  Il retranscrit l’infinie délicatesse des orchidées, la diversité de leurs formes et de leurs couleurs. à leur fragilité, répondent les succulentes, ces plantes « grasses » et charnues qui ont la capacité de résistance à la sécheresse des déserts.» 

D’autres activités sont proposées aux enfants et adultes, toujours à l’aide de vidéos : réaliser en origami, un trèfle à quatre feuilles ou décorer avec des tranches d’oranges séchées… Une nouvelle façon de visiter les serres, successions de plantes en suivant la course et les acrobaties d’un danseur Hip-Hop ( Winter §compagnie11 Dune).

 Les serres abritent une végétation de type méditerranéen. Dans un contexte de réchauffement climatique, c’est un aperçu de la future végétation sous nos latitudes. Les serres ne sont pas traitées chimiquement mais avec seulement des pulvérisations de savon et l’introduction de prédateurs contre les parasites. Les capteurs photovoltaïques, intégrés en toiture permettent de fournir l’électricité. L’eau de pluie est récupérée et stockée dans onze citernes de 25 m3 chacune.

Les étudiants et chercheurs apprécient la bibliothèque, la graineterie et les herbiers qui sont partiellement numérisés. Les conseils sont prodigués, par le directeur Philippe Richard, pour la plantation ou choix des arbres, pour l’aménagement de quartiers de Bordeaux ou bien les expertises des friches. D’ailleurs une friche est apparue, le long de la palissade en bois de chêne qui clôture le jardin botanique, colonisée par des plantes pionnières, (plante apparaissant dans un milieu instable et pauvre). La palissade a été faite avec les chênes détruits par la tempête de 1999.

Loin d’être monotone et statique, le monde végétal est varié et en perpétuelle évolution. « C’est un outil d’observation exceptionnel dans un environnement urbain, espace d’exposition et de préservation du patrimoine. » précise le directeur.

 

Pierrette Guillot 

Les photos sont de WikimédiaCommons, les nénuphars et la vue du jardin de Clément Billerot, un voisin du jardin.