Aide moi à faire seul

Montessori est une méthode éducative centenaire, devenue culte auprès des jeunes parents : quels sont ses secrets ?

 

Sur les couvertures de magazines pour enfants, au rayon des jeux d’éveil, dans les conversations de jeunes parents, le terme Montessori, quasi magnétique, sonne comme une référence d’intelligence et de liberté. Des écoles émergent partout, maternelles, primaires, collèges et même lycées maintenant. Le Bordelais compte plus de dix de ces écoles.

La plus ancienne d’entre elles, Le Jardin des Enfants, située à Camblanes-et-Meynac, illustre parfaitement la croissance de cette pédagogie. Ouverte avec trois enfants en 1999, elle en accueillait douze en 2003 et plus de 80 aujourd’hui, sachant que parallèlement, d’autres établissements ont ouvert dans le secteur. « C’est la seule école en contrat avec l’État, tous les éducateurs étant diplômés par l’Association Montessori internationale » indique Frédérique Torre, co-directrice de cette école, avec Alexia Lefèvre. Elle précise qu’ainsi le programme de l’Éducation nationale est respecté mais appliqué selon leur propre approche pédagogique.

 

Un monde de liberté

Pour lever le mystère sur cette méthode, il suffit de considérer la pièce. « Ce sont souvent de vastes espaces, jusqu’à 60 m2, car les enfants se déplacent facilement. L’éducateur n’est pas debout face à des enfants assis. Il se positionne comme un guide, se déplace de groupe en groupe formé de cinq à six enfants », explique la directrice.

Les classes sont organisées par âges. De la maternelle au CM2, on distingue seulement trois niveaux : les tout-petits de deux et trois ans, les trois à six ans et les six à onze ans. Les enfants s’aident les uns les autres, développant un esprit de respect et surtout de confiance en leur capacité d’y arriver seuls. Car voilà bien l’objectif de la méthode Montessori : « Aide-moi à faire seul »

Loin de l’esprit d’autorité et de notation des écoles traditionnelles, Montessori évolue dans un monde de liberté. Liberté du travail : l’enfant choisit le domaine étudié, s’il le fait seul ou à plusieurs, sur la table ou au sol ; liberté de se déplacer (en marchant), de communiquer (en chuchotant), de faire des pauses à son propre rythme (sur le tapis ou dans le jardin), d’aller aux sanitaires sans permission préalable. L’enfant reçoit un programme pour la semaine, par exemple le présent en français et les additions en maths. C’est à lui de gérer son temps et de savoir par quoi il a envie de commencer.

 

Confiance en soi

L’apprentissage des fondamentaux n’étant pas qu’une affaire de savoir, ici il passe par le développement des cinq sens. Si l’on comprend bien qu’un tel cheminement implique fatalement l’absence de notes et de devoirs, de cartable, en revanche il s’appuie sur la manipulation de matériel adapté. « C’est la répétition des exercices qui permet la mémorisation du sujet d’étude », explique Madame Torre. Par exemple pour la préhistoire il comprendra le cours de l’évolution par des figurines d’animaux préhistoriques déposées convenablement sur le large poster illustrant l’histoire de l’Humanité. Si le sujet de botanique s’y prête, la leçon aura lieu dans un parc.

La vie en communauté englobe cet enseignement. Lorsque leur anniversaire arrive, ce sont les enfants qui réalisent le gâteau et non leur maman. Le midi, les éducateurs déjeunent avec les bambins qui, même petits, mettent eux-mêmes le couvert, se servent, rangent, nettoient la table et balaient. Il n’est pas rare qu’ils aient la mission de prendre soin d’un potager ou de la vie d’un lapin en classe.

Toutefois autonomie peut rimer avec patience…Ainsi le temps peut sembler long le soir avant qu’ils ne parviennent à lacer leurs chaussures tout en boutonnant correctement leurs manteaux, sous le regard de l’éducatrice qui n’intervient pas.

La liberté d’enseigner a un prix, aussi sélectif que la méthode, lequel s’inscrit dans une fourchette de 5 000 à 8 500 euros l’année, hors repas, dès la maternelle. Madame Torre cite l’exemple d’une maman, justifiant son important sacrifice financier, « Moi, je construis la maison de ma fille » par l’acquisition de la confiance en soi, du respect mutuel et du sens de la citoyenneté.

Dominique Galopin

 

 

Encadré

« Changer la société par l’éducation »

En 1902 à Rome, Maria Montessori, médecin, est nommée assistante de clinique psychiatrique. C’est là, au contact d’enfants très défavorisés et en difficulté qu’elle commence à se forger des convictions sur la possibilité de « changer la société par l’éducation ». Elle ouvre alors sa première école dans un quartier pauvre de Rome pour y développer sa pédagogie unique : accompagner l’enfant à son rythme, sans autorité, dans le but de favoriser son autonomie. Devant l’engouement pour sa méthode, elle fonde en 1929 l’Association Montessori internationale (AMI), garante de la formation des éducateurs. Aujourd’hui il existe 243 établissements privés, mais seuls 110 sont reconnus par l’Association Montessori France. En effet le nom « Montessori » n’ayant pas été déposé, toute école peutde l'école se déclarer en être une mais le label « agréé par AMI » est garant de la qualité de formation  des éducateurs de l'école.