Silence compris

Au monastère du Broussey la parole est rare, la méditation est la règle.

Le couvent des Carmes déchaux[1] du Broussey est situé sur la commune de Rions à quarante kilomètres de Bordeaux. Bâti au sommet d’une colline, il offre un superbe panorama sur la vallée de la Garonne entre vignes, prairies et forêts. Treize moines vivent dans cette communauté dans le silence et le recueillement, en référence aux règles de l’ordre du Carmel, édictées par Sainte-Thérèse d’Avila et Saint-Jean de la Croix au XVIe siècle. Depuis 1960, une hôtellerie permet à des groupes ou des particuliers de séjourner et de participer aux activités liturgiques des moines.

 

La liturgie des heures

L’ordre des Carmes déchaux est un ordre religieux catholique contemplatif et apostolique, appartenant à la catégorie des ordres mendiants. La journée est programmée de manière rituelle de 6 h 30 le matin à 20 h 45 le soir. « De complies à laudes, le silence est la règle », précise le frère Vincent-Marie, sous-prieur du couvent. Les complies sont les dernières prières du jour dans la liturgie des heures et les laudes sont les premières au lever du soleil. Entre les deux, le silence est de mise dans tout le monastère. Les laudes (louanges) sont chantées. Les moines sont répartis de part et d’autre de l’autel de la chapelle et chantent des psaumes en se répondant tour à tour. Dans la journée, entre les différents offices, le silence est recommandé même en travaillant. Néanmoins, la réforme thérésienne permet des « récréations » après les repas où les moines peuvent s’entretenir entre eux de manière profane. Déambuler dans le monastère, le cloître, la bibliothèque, la salle du chapitre ou la chapelle permet d’écouter ce silence, seulement troublé par le chant des oiseaux.

 




 

La chapelle du monastére
La chapelle du monastére

Un ordre moderne

Pour le frère Vincent-Marie, il existe plusieurs définitions du silence tel qu’il est pratiqué chez les Carmes. Le premier, c'est le silence de précaution. « Celui qui parle inconsidérément en éprouve les effets malheureux ». Se taire évite de mal se servir de la parole. Chacun doit peser ses mots car « l'abondance de paroles ne va pas sans excès ».

La deuxième, c'est le silence d'écoute. C'est tout à fait le sens de la pensée thérésienne. Les moines pratiquent deux heures par jour des oraisons, prières silencieuses. Pour le frère Vincent-Marie « il s'agit d'écouter la parole de Dieu à l'intérieur de soi-même ». C'est par la pratique quotidienne que l'on arrive à se détacher du monde extérieur pour « se sentir habiter par Dieu ».

Enfin, on peut parler du silence des pensées qui troublent. « Il est parfois difficile, précise le frère, de se débarrasser de certaines idées ou faits qui ont tracassé pendant la journée. Comment se déconnecter totalement de la réalité ? ». Là encore, pour les moines, il s'agit, par la pratique régulière des oraisons, de vivre intensément cette rencontre spirituelle entre Dieu et soi-même.

S'il s'agit d'un ordre mendiant, l'ordre des Carmes déchaux n'en ait pas moins moderne. Un site internet permet de mieux connaître le Broussey et ses activités. Une chaine vidéo sur YouTube, intitulée Oraisons Thérésiennes, explique les origines et les principes de cette prière silencieuse.

Les frères du Broussey ne pratiquent aucun artisanat, leur apostolat s'exerce essentiellement sur place (accueil de groupes), ils ont mis en fermage le vignoble ce qui permet un revenu annuel fixe.

C'est un lieu à découvrir. Le calme et la sérénité qui baignent cet endroit semblent dire que « le silence n'est pas vide, il est plein de réponses »[2]

 

Jean-Pierre Ducournau

 

 [1] Un des signes de la réforme de Sainte-Thérèse d’Avila était que les Carmes allaient pieds nus dans des sandales, d’où leur nom : déchaux pour déchaussés)

 [2] Gabriel Tellier

Site Internet : www.couventdubroussey.fr